Sans notes
Philip Glass, le tour d’une œuvre vertigineuse en cinq podcasts
Image telerama.fr

“Einstein on the Beach”, l’opéra minimaliste de Philip Glass créé en 1976, est donné à la Philharmonie de Paris du 14 au 16 novembre. Pour l’occasion, “Télérama” a sélectionné cinq émissions à écouter en replay pour explorer le travail du compositeur.

Ses phrases musicales, souvent qualifiées de répétitives, emportent ses auditeurs dans des méditations sans fin, ou dont on voudrait ne jamais sortir. Né en 1937, l’Américain Philip Glass a marqué les esprits par ses compositions, qui ont imprégné le cinéma (Kundun, The Hours…) comme les œuvres de David Bowie ou Depeche Mode. À l’occasion de la version scénique du fabuleux Einstein on the Beach, donné à la Philharmonie de Paris du 14 au 16 novembre 2022, focus sur cet admirateur de Bach ou Erik Satie à travers cinq podcasts.

“Les musiques de films de Philip Glass”, dans “Certains l’aiment Fip”, sur Fip

Ses mélodies imprègnent les images jusqu’à en créer de nouvelles, inédites et mentales. Puis elles serpentent en boucle dans l’imaginaire du spectateur, où elles semblent former des halos. Les œuvres de Philip Glass ont porté de nombreux films. L’octogénaire américain a par exemple composé les bandes originales de Mishima, de Paul Schrader, ou de Kundun, de Martin Scorsese. Lui qui déteste le terme « minimaliste », souvent utilisé pour qualifier son style, ­admire Bach, Erik Satie, Thelonious Monk. Dans Certains l’aiment Fip, l’animatrice Susana Poveda et le réalisateur Denis Soula évoquent ses musiques de film les plus fameuses, de la Trilogie des Qatsi, de Godfrey Reggio, à The Hours, de Stephen Daldry, en passant par Merci la vie !, de Bertrand Blier.
q Écouter « Les musiques de films de Philip Glass ». 60 mn.

“Les études pour piano de Philip Glass”, dans “La tribune des critiques de disques”, sur France Musique

L’Américain Philip Glass est « le compositeur vivant le plus prolifique, le plus joué probablement », selon Jérémie Rousseau, producteur de La tribune des critiques de disques sur France Musique. En studio, les journalistes Negar Haeri et Sarah Léon ainsi que le pianiste François Mardirossian écoutent à l’aveugle différentes versions de trois de ses Études pour piano. Sarah Léon, de Classica, vante une musique « intense émotionnellement, pas mécanique et sans âme », tandis que François Mardirossian pointe une partition « considérée à tort comme facile, alors qu’elle est ultra redoutable : le moindre écart rythmique ou mélodique s’entend tout de suite ». Avec vivacité, le trio évalue les nuances, le tempo, les ruptures et les reprises, la brusquerie ou la délicatesse des interprétations de Nicolas Horvath, Jeroen van Veen, Maki Namekawa et Víkingur Ólafsson. Une analyse stimulante, aussi vibrante que les notes de Glass.
r Écouter « Les études pour piano » de Philip Glass. 120 mn.

“L’envers d’Einstein on the Beach”, dans “Les nuits magnétiques” sur France Culture

C’est à un voyage spatio-temporel complet qu’invite France Culture avec ces Nuits magnétiques de 1979. On y plonge dans les coulisses de l’œuvre qui avait fait l’événement au Festival d’Avignon, trois ans auparavant : Einstein on the Beach, de Philip Glass et Bob Wilson. Vertigineuse, répétitive et minimaliste, cette pièce de près de cinq heures se déroule comme un rêve. Pendant quarante minutes, Claude Hudelot, Catherine Clément et Janine Chollet diffusent les impressions des techniciens, artistes, spectateurs. Il y a cette « grande horloge » du décor « qui doit bouger d’un mètre en dix minutes » – une gageure, puisqu’il faut la faire glisser millimètre par millimètre –, ou encore l’ennui profond d’un homme qui manifeste son ­besoin d’aller se dégourdir les jambes. Témoignages et extraits sonores s’entrecroisent sans commentaire, rendant ce documentaire organique prenant.
r Écouter « L’envers d’Einstein on the Beach ». 39 mn.

“Phil Glass”, dans “Jour de Fred”, sur France Inter

« Le temps était notre langage commun depuis le début, expliquait en 2014 Philip Glass, évoquant sa rencontre avec Robert Wilson, le metteur en scène d’Einstein on the Beach. À un moment, on a décidé de faire le portrait de quelqu’un, il a suggéré Hitler, j’ai pensé à Gandhi, il a évoqué Einstein et tout s’est déclenché ! Einstein était une superstar, avant tout un Européen, un pacifiste qui a participé à l’élaboration d’une bombe. » Avec aisance, le compositeur racontait au micro de Frédéric Mitterrand la genèse de l’œuvre. Et réagissait à différentes archives : des propos de Bob Wilson (qui jugeait sa musique « extrêmement mathématique »), de son enseignante Nadia Boulanger ou de l’écrivaine Doris Lessing, avec qui il écrivit des opéras. Il évoque aussi avec sincérité ses expériences à Hollywood, où il a composé une trentaine de bandes originales : « Il y a là-bas des gens très talentueux, mais malheureusement les collisions avec le monde commercial sont nombreuses… » Un entretien détendu, nourri de voix du passé.
r Écouter « Phil Glass », dans Jour de Fred. Réalisation : Marie-Annick Raimbault. 39 mn.

“Musique répétitive, repeat after Glass”, dans “Les chemins de la philosophie”, sur France Culture

« La répétition a la sainte assurance de l’instant présent », écrit le philosophe danois Søren Kierkegaard en 1843. Il oppose la répétition à l’espoir, toujours incertain, et au ressouvenir, fatalement mélancolique. Il définit, plus d’un siècle avant son avènement, le sentiment d’extase et d’éternité, rassurant, que procure la musique répétitive de Philip Glass. Le parallèle est proposé par Adèle Van Reeth, dans le dernier épisode d’une série des Chemins de la philosophie consacrée au compositeur, intitulée Philip Glass, répétez s’il vous plaît ! Avec le musicien et auteur Johan Girard, ils replacent les œuvres de Glass dans le contexte des années 1960, dans leur opposition à la musique sérielle, « anti-répétitive », et celle de John Cage, qui prône l’indétermination. La musique de Glass invite à repenser le rapport au temps et à tendre l’oreille pour percevoir les petites différences nichées dans la répétition. Les subtils et subreptices déphasages ont une esthétique philosophique ici très joliment analysée, on y pense la musique répétitive comme une lutte contre l’évanouissement du temps.
s Écouter « Philip Glass, répétez s’il vous plaît ! ». 58 mn.


À voir
Einstein on the Beach, à la Philharmonie de Paris du 14 au 16 novembre 2022.

À lire
Paroles sans musique, de Philip Glass, éd. Philharmonie de Paris / La rue musicale, 384 p., 26 €.


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