Sur France Culture, Jacques Bérès, le cancre qui a dit oui avec le cœur |
Avant de devenir chirurgien et de créer Médecins sans frontières, Jacques Bérès faisait l’idiot en classe… Une vitalité intacte qui n’exclut pas la gravité.
« Vous n’avez aucune chance », le prévient la secrétaire de la faculté de médecine. Pourtant, Jacques Bérès, renvoyé du prestigieux établissement Louis-le-Grand – où il était inscrit en khâgne –, réussira le concours et deviendra chirurgien. Avant de cofonder Médecins sans frontières puis Médecins du monde. Né en 1941, ce juif baptisé (pour échapper aux exactions du nazisme) a pour marraine l’écrivaine Colette, proche de son père, éditeur. « Elle me considérait comme un petit singe à qui elle faisait guili-guili », raconte l’homme, lucide, à Dani Legras pour France Culture.
Au fil des cinq épisodes d’A voix nue, il se montre plein d’humour et de vitalité. Pas question de s’attarder sur les abandons successifs qu’il a vécus : ses parents raflés puis retrouvés à la Libération, sa mère qui quitte la France pour le Brésil. Pudique, il préfère s’amuser à raconter son passé de cancre. Avant d’entrer en classe préparatoire – où il trouva enfin « des gens qui se servaient de leur cerveau » –, il s’ennuyait au bout de quinze minutes de cours. « Il me restait le reste de l’heure pour faire l’idiot : je ne m’en suis pas privé », plaisante celui qui dormait pendant les cours du philosophe Merleau-Ponty. Quand il évoque sa première expérience de guerre, le ton se fait plus grave. C’était en 1968, au Vietnam, pendant l’offensive du Têt. La voix encore chargée d’émotion, il raconte les conditions de travail difficiles et le choc de se trouver face à des cadavres autour desquels les mouches bourdonnent. Livrant un témoignage bouleversant et passionnant.