Sexisme à Radio France : la culture du silence fait de la résistance |
Chamboulé par #MeToo et la fin de l’omerta sur de vieilles affaires en interne, le groupe Radio France s’efforce aujourd’hui de lutter contre le sexisme dans ses rédactions. Mais des freins entravent la libération de la parole chez les victimes, le plus souvent des précaires. Des témoins dénoncent toujours des ambiances sexistes, notamment au sein du réseau France Bleu…
Hiver 2019. Dans un studio du réseau radiophonique France Bleu, une jeune journaliste enchaîne les flashs d’information. Elena (les prénoms ont été changés) connaît l’exercice : cela fait trois ans qu’elle a intégré sur concours le « planning » de Radio France, qui regroupe une petite centaine de salariés CDD bringuebalés de rédaction en rédaction pendant au moins deux ans, avant de pouvoir espérer un CDI. Mais ce matin, elle a du mal à se concentrer. A côté d’elle, son collègue est en grande conversation avec les techniciens de la station. Sujet-objet de la discussion : une animatrice. « Elle, elle pue le sexe ! Elle me fout la trique, je pourrais en faire ce que je veux ! » déblatère l’homme tout en intimant à sa jeune consœur de ne pas l’écouter. Les techniciens sont hilares. Elena, elle, se fige intérieurement. « J’étais paniquée par cette atmosphère, je tremblais. Je me suis enfuie du studio, sans échapper à une remarque sur ma tenue », nous raconte la jeune femme, que nous rencontrons à la terrasse d’un café.
Cette matinale polluée par des propos à connotation sexuelle lui rappelle la cascade de situations douloureuses qu’elle endure depuis qu’elle fréquente les studios. « Je suis arrivée à Radio France pleine d’espoir… J’ai vite déchanté », commence-t-elle avec un sourire triste. Dès ses premiers contrats, dans une locale du sud de la Fra...
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