Streaming audio : est-il encore possible d’écouter autrement ? |
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29 novembre 1877 : les Américains entendent pour la première fois un enregistrement sur un appareil encore mystérieux… le phonographe, dont un certain Thomas Edison faisait la démonstration. 145 ans plus tard, on dépasse le cap des mille milliards d’écoutes musicales en streaming. Dans ce contexte, les plateformes de streaming comprennent plus que jamais l’importance d’intégrer une dimension communautaire au contenu qu’elles hébergent ainsi qu’à l’expérience utilisateur qu’elles proposent.
Pour dominer le marché : monopoliser l’attention
Avec la fin de l’année, débute la traditionnelle avalanche de best of, compilations, bêtisiers et rétros en tout genre. Les acteurs majeurs du streaming ne dérogent pas à la coutume… en en faisant un outil de marketing viral, comme l’atteste le tsunami de Spotify Wrapped qui inonde les réseaux sociaux. Si Spotify a été pionnier en la matière dès 2016, Apple Music s’en inspirait deux ans plus tard avec ses Replay. C’est au tour de YouTube Music d’inaugurer cette année une fonctionnalité similaire. Au fil du temps, ces rétrospectives musico-algorithmiques se dotent de nouveaux gadgets rendant l’expérience toujours plus personnalisée, plus ludique, et surtout plus virale chaque année : un bouche-à-oreille numérique qui pousse à s’abonner en jouant sur le syndrome FOMO (fear of missing out)… Un phénomène qui peut être un véritable levier pour les mastodontes du secteur, ceux dont l’audience comme la stratégie est pensée « en masse ».
Pas besoin de tendre l’oreille : les algorithmes de recommandation, forts du nombre massif de données utilisateurs mobilisables, nous soufflent ce que nous pourrions aimer écouter. Mais c’est aussi là le problème pour certains mélomanes, qui déplorent le fait d’être enfermés dans une bulle de filtre – une boucle musicale.
Le service audio Pandora, fondé sur le Music Genome Project et dont l’ambition est justement d’éviter cet écueil en couplant IA et expertise humaine pour séquencer votre ADN musical, enregistre pourtant une baisse conséquente de son nombre d’utilisateurs.
Du côté des artistes, c’est l’engrenage d’un système économique tout entier qui est pointé du doigt : certains sont évincés par les algorithmes s’ils ne sont pas assez écoutés ou pas suffisamment présents dans les dispositifs de découvertes (playlists, mise en avant, nouveautés, etc.). Car en moyenne sur les plateformes, 1% des artistes génèrent 80% des lectures. Pour les artistes, il faudrait jusqu’à 11 milliards d’écoutes sur Spotify pour égaliser les recettes potentielles générées par la vente de leur merch vintage… et c’est donc mécaniquement que la stratégie s’oriente vers des produits dérivés plutôt que la promotion des artistes via les applis (et que votre regard a probablement croisé plus de t-shirts Led Zeppelin ou Nirvana que d’albums desdits groupes au cours de ces dernières années…).
Et pourtant, l’Autorité de la concurrence britannique vient de dévoiler un rapport, concluant contre toute attente que les plateformes dominantes de streaming audio ne sous-rémunéraient pas les artistes, compte tenu du fait qu’elles enregistrent plus de pertes que de bénéfices, et ce malgré les récentes augmentations du prix des abonnements.
Est-ce le signe d’une prochaine évolution de ce secteur, avec l’émergence de plateformes alternatives, se réclamant plus créatives, plus justes dans la répartition des revenus ou avec des innovations technologiques majeures ?
Derrière les géants, un vaste terrain pour innover dans les modes d’écoute
Ces acteurs alternatifs, de moindre dimension, se distinguent souvent par un aspect collaboratif, ou une expertise technique (comme le français Qobuz), mais aussi par des contenus spécifiques à un genre musical, voire de niche. Naxos tire son épingle du jeu avec sa plateforme Naxos Music Library grâce à la richesse des métadonnées associées à son vaste catalogue de musique classique, ainsi que par les diverses ressources mises à disposition par des musicologues. Deutsche Grammophon a lancé fin novembre sa plateforme hybride STAGE+, avec une offre de concerts vidéo live (et en 4K) en plus d’une vaste bibliothèque sonore disponible en Dolby Atmos.
Mais, malgré leurs promesses d’innovation et leur positionnement conçu pour répondre aux géants du marché avec des démarches voulues plus vertueuses, ces plateformes alternatives ne rencontrent pas toujours un public suffisant, souffrent de failles juridiques ou sont simplement absorbées, et contraintes de mettre la clef sous la porte. C’est récemment le cas de la plateforme collaborative Drooble, ou de l’archive communautaire spécialisée dans la K-pop VLive, qui mettent fin à leur service.
Alors qu’émergent de nouveaux formats de streaming toujours plus hybrides, que la surabondance des offres interpelle, et que même la tentative préliminaire de TikTok avec Resso n’a pas entièrement convaincu, l’innovation pour les plateformes alternatives est un enjeu crucial dans l’écosystème de l’audio à la demande. Pour ces acteurs, comme pour les géants du stream, il reste aussi tout un monde à conquérir, en commençant par les territoires où les jeunes sont largement majoritaires. C’est l’un des bilans du tout premier Salon des Industries Musicales d’Afrique Francophone, où BoomPlay, plateforme née à Lagos au Nigeria et qui revendique 75 millions d’auditeurs mensuels, peut rivaliser avec Apple ou Spotify.
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