Podcast : tout, tout, tout, vous saurez tout sur le Planning familial |
Le Planning familial a désormais son podcast ! Six épisodes aux côtés des conseillères conjugales et familiales, pour découvrir leurs missions et désamorcer les fantasmes autour de l’association. Rencontre avec la journaliste Isabelle Duriez, spécialiste des droits des femmes, qui a choisi de tendre son micro à ces femmes au service des autres.
Le Planning familial, on connaît de nom. Mais pas toujours de l’intérieur. Qui nous accueille ? Où et comment se déroulent les entretiens ? Quelles questions peut-on poser ? La journaliste Isabelle Duriez, qui aborde les droits des femmes dans ses articles depuis des années, a passé des heures et des heures avec les conseillères conjugales et familiales du Planning familial de Marseille. Son but : enregistrer les entretiens avec les femmes qui frappent à la porte, faire entendre leurs questionnements, leurs angoisses, leur ingénuité parfois. Et donner à entendre le Planning de l’intérieur, via six épisodes très immersifs.
En tant que journaliste, vous avez travaillé des années sur les droits des femmes, essentiellement dans la presse magazine. Pourquoi passer au son pour raconter le Planning familial ?
Je suis allée plusieurs fois au Planning au fil des années, mais toujours avec le sentiment de ne pas y passer suffisamment de temps pour vraiment comprendre ce qui s’y joue. Quand on assiste à des entretiens menés par des conseillères conjugales et familiales, on réalise qu’on entend des histoires très denses en termes d’enjeux : il s’agit de vie intime, de sexualité, de désir d’enfant…
Il y a trois ans je suis allée faire un reportage à Marseille. Dans le cadre de la campagne pour les élections régionales, Marion Maréchal Le Pen avait menacé, si elle était élue, de couper les subventions au Planning. J’y ai donc passé deux jours, et j’ai assisté à des entretiens très forts sur l’IVG, ainsi qu’à des cours d’éducation sexuelle dans un collège, qui m’avaient pas mal questionnée en tant que maman. J’ai aussi découvert des missions du Planning que je ne connaissais pas du tout, comme l’information des personnes en situation de handicap ou la prévention des violences dans les écoles primaires. J’ai pris conscience qu’il y avait des millions d’histoires à raconter. Le podcast permet de le faire, en prenant son temps.
Votre série met en lumière des missions du Planning parfois critiquées. Vous enregistrez par exemple une séance avec des élèves de CP. Loin des fantasmes de certains militants, on y entend bien plus parler d’émotions que du corps…
Ce programme avec les primaires s’appelle « le Cercle magique » et vient d’Amérique du Nord, notamment du Canada. Il a été développé dès 2005 dans des écoles des quartiers nord de Marseille. Les conseillères s’étaient rendu compte à travers leurs séances d’éducation sexuelle au collège que c’était presque déjà trop tard : une violence verbale existait déjà entre les préadolescents.
Oui, le Planning a été pas mal attaqué l’année dernière, notamment sur la question de l’éducation sexuelle dans les écoles. Il y a beaucoup de fantasmes sur ce qu’il est et la façon dont il intervient. Enregistrer une séance dans une classe de CP, c’est aussi montrer aux auditeurs que quand le Planning se déplace dans un école primaire, ce n’est pas pour enseigner aux élèves à se masturber ! Il leur apprend ce que veut dire être heureux, être en colère, à exprimer leurs sentiments.
J’ai aussi consacré un épisode à l’éducation sexuelle dans un lycée professionnel avec des élèves de seconde, autour d’une pièce de théâtre sur les relations garçons-filles. C’était assez surprenant. La question de la contraception et de l’IVG a été abordée très rapidement. Les gamins préféraient parler des nudes sur les réseaux sociaux, des filles traitées de filles faciles parce qu’elles ont mis une jupe alors que les garçons peuvent faire tout ce qu’ils veulent, des questions de réputation, des féminicides aussi.
Ces séances abordent tout simplement les rapports hommes-femmes, les rôles imposés par la société… Les filles se demandaient si elles avaient le droit d’avoir une sexualité et d’en parler. Les garçons, eux, étaient dans des rapports de violence entre eux. Au final, l’éducation à la sexualité, c’est très large, ce n’est pas que la contraception et l’IVG. C’est l’éducation à la relation et à l’autonomie.
La vision commune des missions du Planning est-elle encore trop hygiéniste et purement médicale ?
On en a souvent une fausse idée, ou pas d’idée du tout. J’ai pensé cette série de podcasts pour informer sur la manière dont se déroule une visite au Planning. Moi-même, j’ai été étonnée de constater que les entretiens de déroulent non pas dans un cabinet médical mais dans de petits salons accueillants avec des fauteuils et des coussins. Ne serait-ce que via le décor, on nous donne l’information qu’on n’est pas chez un médecin, mais avec des conseillères qui sont là avant tout pour nous écouter. Si il y a besoin de faire des examens médicaux, on voit ensuite un professionnel, mais la première étape est toujours la rencontre avec une conseillère conjugale et familiale.
Il faut bien comprendre que l’aspect sanitaire est assez minime au Planning. Oui, on y parle de contraception, d’IVG, d’anatomie… Mais même lors d’une consultation pour une IVG, la description de la technique médicale ne dure que dix minutes, puis la conversation peut continuer pendant quarante-cinq minutes sur des sujets beaucoup moins sanitaires : les angoisses que ça soulève, la relation de couple…
C’est aussi pour ça que je voulais rendre hommage à ces conseillères. Elles font tout un travail basé sur un type d’écoute particulière : celle centrée sur la personne. En assistant aux entretiens, on réalise qu’elles reformulent sans cesse ce que leur disent les femmes qu’elles reçoivent. D’abord pour préciser, mais aussi pour les faire rebondir, les aider à trouver elles-mêmes une solution. Les conseillères ne donnent pas leur opinion, elle sont vraiment au service des autres. J’ai assisté à une cinquantaine d’entretiens, et je l’ai constaté à chaque fois. C’est toujours impressionnant car, dans notre société, il y a peu d’endroits où l’on peut parler en totale confiance, à quelqu’un qui n’est là que pour nous écouter.