Sur France Culture, les sorcières se dévoilent sans filtre |
Céline du Chéné a bûché sur ces femmes en marge, rejetées au XVIe siècle, et leurs descendantes, les féministes. Quatre épisodes bien documentés à (ré)écouter en ligne.
Qui aurait pu présager que les sorcières seraient à la mode au XXIe siècle ? Sur France Culture, Céline du Chéné a consacré quatre épisodes de LSD, la série documentaire, à ces pythies d’hier et d’aujourd’hui. Une série diablement captivante, très documentée, et réalisée par l’alchimiste du son Laurent Paulré. La productrice y évacue les clichés en croisant les interviews de chercheurs spécialisés (en histoire, ethnologie, médecine, art, gender studies) et des archives – dont la lecture d’un procès, avec Richard Bohringer dans le rôle du juge qui condamne au bûcher une innocente incarnée par Elina Löwensohn. Avant de tendre le micro à la relève, une nouvelle génération de femmes toutes-puissantes.
Pourquoi note-t-on aujourd’hui un regain d’intérêt pour les sorcières ?
La sorcière est devenue politique, alors que ce n’était pas le cas à l’origine. Pour comprendre ce phénomène, j’ai mis en évidence les liens entre les femmes d’aujourd’hui et celles des XVIe et XVIIe siècles accusées de sorcellerie, torturées et brûlées vives sur un bûcher – il y eut plus de 60 000 victimes à cette époque en Europe. La sorcière est une femme révoltée, en lutte contre le patriarcat. Au fil du temps, les féministes se sont réapproprié ce symbole fort. Aux Etats-Unis, l’écrivaine écoféministe Starhawk propose même des cérémonies qui unissent des activismes écologique et anticapitaliste et la magie.
Avez-vous rencontré des sorcières maléfiques ?
Non, j’ai préféré m’intéresser uniquement aux sorcières « blanches », les plus authentiques, celles qui sont du côté de la spiritualité bienveillante. Ce sont des femmes de l’ombre, des guérisseuses, qui n’ont jamais recours à la publicité mais plutôt au bouche-à-oreille. Elles préfèrent rester discrètes. Décrocher une interview avec elles n’a pas été simple ! Heureusement, j’ai un solide carnet d’adresses : pour les besoins de l’émission Mauvais genres (animée par François Angelier sur France Culture), à laquelle je participe depuis quinze ans, j’ai croisé d’éminentes représentantes de l’occulte, parfois des artistes dont la créativité flirte avec le chamanisme.
Certains voient en la sorcière une représentante de la communauté queer (qui rejette une vision binaire des sexualités)…
Disons qu’elle est un trait d’union entre le féminisme, le spirituel et le queer. Ce terme comme celui de « sorcière », a été une insulte ; il est désormais une fierté.