Radio France : 299 postes supprimés à l’horizon 2022 |
Lundi 25 novembre, les stations de Radio France sont en grève. Jeudi 14 novembre, la direction du groupe public avait détaillé son plan d’économies : 299 postes supprimés à l’horizon 2022, dont 236 ouverts au départ. Les syndicats jugent ce plan “insoutenable” et craignent une perte d’autonomie de la Maison ronde.
Ce sont finalement 299 postes qui seront supprimés à Radio France d’ici 2022. Sibyle Veil, pdg du groupe public, a précisé aujourd’hui un plan de départs volontaires programmé dans le cadre de larges économies à faire (60 millions d’euros). « Mon projet préserve nos sept chaînes de radio et nos quatre formations musicales, a-t-elle indiqué dans un courriel adressé à ses équipes. Cela implique de faire évoluer nos activités, renoncer à certaines, en renforcer d’autres. »
Sur son compte Twitter, le Syndicat national des journalistes (SNJ) de Radio France détaille les chiffres annoncés : « Au total, 236 postes seront ouverts aux départs ; 299 seront supprimés mais 61 d’entre eux sont des postes actuellement vacants ou dont on sait qu’ils seront vacants d’ici trois ans, et deux sont des “passerelles”. Parallèlement, 76 postes seront créés, 50 pour le numérique et 26 profils nouveaux rendus nécessaires par les nouvelles organisations [Radio France se déploie sur le numérique, ou encore organise depuis quelques années de nombreux spectacles en ses murs, ndlr]. » Sibyle Veil explique encore que « tous les départs seront volontaires ; personne ne sera obligé de quitter l’entreprise s’il ne le souhaite pas ». Sont concernés les départs pour projet professionnel externe et les départs volontaires à la retraite.
Dans un communiqué, le SNJ juge ce plan « insoutenable ». « Comment faire plus avec moins de personnel ? C’est le véritable enjeu de ce plan, alors que l’État et la direction de Radio France nous demandent de renforcer encore notre présence sur le numérique, avec plus de vidéos, plus de publications web, plus de podcasts natifs. […] Contrairement à ce qu’affirme Sibyle Veil, ce n’est pas une simple réorganisation du service public de la radio. C’est un grave affaiblissement qui nous met à la merci de nos concurrents. »
« Certains secteurs sont plus concernés que d’autres par ce plan, note Philippe Ballet de l’Unsa. Parmi les départs annoncés, on compte 33 choristes, 15 réalisateurs [de France Musique et France Culture], 17 documentalistes, de nombreux agents de gestion… Ce qui induira par exemple davantage de tâches administratives échues aux salariés. Alors qu’il y a déjà surcharge à tous les étages ! » Catherine Hamaide, de la CGT, pointe l’axe fortement numérique du projet stratégique de la présidence : « La radio n’est plus le cœur de métier de Radio France. »
Pour Jean-Paul Quennesson, du syndicat Sud, ces économies à faire à tout prix, couplées à la réforme de l’audiovisuel public (et au rapprochement avec France Télévisions), font craindre une perte d’indépendance du groupe public. « Par exemple, dans une course aux ressources propres, France Inter développe des partenariats avec des sociétés extérieures, notamment pour ses podcasts. Certains sujets pourront-ils être traités aussi librement qu’aujourd’hui dans ces conditions ? Ne risque-t-on pas d’être prudent vis-à-vis des groupes privés qui financent nos contenus ? » Par ailleurs, il pointe l’impréparation de ce plan. « On n’imagine pas administrer un régime sec à quelqu’un sans analyser avant son état de santé… De bons résultats d’audience ne veulent pas dire que les salariés vont bien. Les gens sont en souffrance au travail, les risques psychosociaux importants. On atteindra largement, à mon sens, le nombre de volontaires au départ. Les employés de Radio France ont l’impression de ne plus être aimés ni désirés par leur direction. »
Des réunions entre syndicats et des assemblées générales du personnel se tiennent à la Maison ronde. Donneront-elles lieu à une grève ? Le souvenir de celle, historique par sa longueur (28 jours) de 2015, plane. « Les mauvaises relations existant entre la ministre de la Culture et le pdg d’alors, Mathieu Gallet, avaient joué en notre faveur, précise Philippe Ballet. Mais cette fois, nous ne recevons aucun soutien du ministère, bien au contraire. Nous nous battons contre notre propre direction mais aussi contre l’État. »
Un processus d’information-consultation entre la direction et les élus débutera le 25 novembre, pour une durée de trois mois. Les premier départs devraient être entérinés en mars prochain.