Hervé Le Tellier (3/3) |
Épisode 40 - Dans la boîte noire.
« Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l’intelligence et même le génie, c’est l’incompréhension », écrit Victor Miesel, l’auteur de la confession suicidaire intitulée L’Anomalie planquée dans la soute du roman L’Anomalie d’Hervé Le Tellier, publié en 2020 aux éditions Gallimard.
Mesdames et messieurs, prenez donc place à bord du vol Paris/New York AF006. Un jour d’été, ce Boeing 787 pénétra « quelques instants » dans les courants tourbillonnants d’un nuage « supercellulaire » semblable « à des dizaines d’enclumes soulevées par une main invisible ». Tous les passagers en furent notoirement secoués. Car, trois mois plus tôt, sur la même ligne, les mêmes passagers étaient déjà dans ce même avion... Voilà le point de départ de ce conte fantastique et souvent troublant, drôle ou doux-amer, comme si Woody Allen avait signé une saison de Lost. Ensuite, « les turbulences ont cessé et le soleil est revenu dans la cabine. C’est aussi la définition du Prozac. »
Que s’est-il passé ? Comment ce récit choral très feuilletonnesque, qui carbure à la métaphysique tout en détournant les genres, a-t-il pu séduire les si sérieux jurés du Goncourt et voir en quelques mois ses ventes décoller vers le million d’exemplaires – du jamais vu, dans l’histoire de ce prix, depuis 1984 et L’Amant de Marguerite Duras.
« Choisir le protocole, agir avec méthode », lit-on à propos du tueur à gages sur lequel s’ouvre ce roman truffé de traits d’esprits, d’hypothèses spirituelles et de samples littéraires plus ou moins dissimulés. C’est ce qu’il convient de définir dans ce troisième et dernier épisode en mode avion, en compagnie toujours aérienne du commandant Le Tellier, suffisamment sage pour nous faire médite sur cette humble évidence : « Le plus grand danger pour un écrivain, c’est de croire qu’il est écrivain. »
Crédits:
Enregistrements : juin-juillet 2021.
Entretien, découpage : Richard Gaitet.
Lectures : Chloé Assous-Plunian, Richard Gaitet, Silvain Gire, Delphine Saltel.
Montage : Sara Monimart.
Prise de son, réalisation, mixage : Charlie Marcelet .
Musiques originales : Samuel Hirsch, Charlie Marcelet .
Guitare et claviers : Zeid Hamdan.
Illustration : Sylvain Cabot.
Production : ARTE Radio.