Ariane Ascaride remonte le fil de sa carrière pour France Culture |
Jeune “bulldozer”, elle dit avoir fini par apprendre la diplomatie. Dans l’émission “A voix nue”, la comédienne Ariane Ascaride évoque son enfance et sa carrière. Un entretien captivant à écouter à partir du 1er avril.
Elle est « l’enfant de la République et d’une famille étrange ». Au micro d’Albane Penaranda, dans A voix nue sur France Culture, Ariane Ascaride dévide la pelote de sa vie. Ce n’est pas céder au cliché de la méridionale que de décrire sa chaleur, son énergie. On l’aborde souvent dans la rue, note-t-elle, assumant la proximité tissée avec son public. « J’ai joué beaucoup de rôles de filles qui font le ménage », tente-t-elle d’expliquer. La comédienne montre aussi un côté tranchant, quand elle raconte sa famille.
Elle a grandi à Marseille avec des « parents un peu marteaux » : lui d’origine italienne, qui nourrissait « un complexe de l’immigré » ; elle « petite ouvrière d’une immense intelligence, qui n’exprimait jamais ce qu’elle avait à l’intérieur ». Hypermnésique quand il s’agit de l’enfance, l’actrice peint « une image paternelle envahissante ». Le père est une espèce de « Peter Pan paranoïaque », capable de vivre une décennie durant aux côtés de sa femme sans lui adresser la parole, mais aussi un magnifique conteur qui entraîna sa fille sur les planches du théâtre amateur.
La petite Ariane intègre le Conservatoire de Marseille, puis celui de Paris — après des études de sociologie, où elle rencontre son compagnon Robert Guédiguian. Son professeur Marcel Bluwal l’appelle « le bulldozer ». Un autre de ses enseignants, Antoine Vitez, capte le doute sous la carapace : « Il a pris la mesure de l’être complexe que j’étais. »
Le cinéma de Guédiguian
De ses débuts au cinéma dans la Communion solennelle, de René Féret, en 1977, elle garde un souvenir mitigé. « J’ai dû apprendre le premier jour à marcher dans un travelling ; le chef opérateur s’était montré extrêmement méprisant, me faisant comprendre que ce métier pouvait être cruel. » Vient ensuite la collaboration avec Guédiguian, « ce cinéma de bande, cette aventure familiale, amicale, fraternelle ».
Avec franchise, Ariane Ascaride évoque les difficultés financières des débuts, les coups de gueule, la diplomatie apprise au fil des années (« maintenant quand je n’aime pas ce qu’il fait je le lui dis en privé, pas devant les autres comédiens »). Elle amuse en détaillant, encore incrédule, la soirée des César où elle fut primée pour Marius et Jeannette — « après mon discours de remerciements, Clint Eastwood s’est levé, puis Johnny Hallyday m’a prise dans ses bras… »
Au fil de ces cinq épisodes, elle révèle ses nombreuses forces, mais aussi sa fragilité. « Je suis très résistante, alors tout le monde a pris l’habitude de s’appuyer sur moi ; mais en s’appuyant ils m’étouffent. » Sensible et captivante, la série d’entretiens dépeint une belle personne, qui n’a jamais fait de publicité, par conviction (« ce n’est pas mon métier ! »). Et rêve désormais de jouer « une fasciste épouvantable », pas moins…